Adaline était en plein ménage, traînant son vieil aspirateur bruyant à travers le salon, vêtue d'un t-shirt déformé et d'un pantalon de yoga qui lui arrivait à peine aux chevilles. Une tenue tout sauf flatteuse mais elle était seule alors ça n’avait pas d’importance… jusqu’à ce que la sonnette retentisse. Elle s’arrête, fronçant les sourcils. Elle n’attend personne. Elle jette un coup d'œil rapide à travers la fenêtre mais elle ne reconnait pas la voiture garée devant la maison. Peut-être un livreur qui s’est trompé d’adresse ou une nouvelle vague de mormons ? Avec un soupir, elle pose sa tasse et se dirige vers la porte, prête à faire son sourire poli d’usage.
Et là, elle le voit. Andrew. Celui qu'elle n'a pas vu depuis une quinzaine d'années, peut-être plus ? Elle reste figée sur le seuil de la porte, son cerveau essayant de comprendre comment c’est possible qu'il soit là, devant elle, comme s'il sortait tout droit d'un de ces rêves nostalgiques. Sa tête lui hurle de répondre, de dire quelque chose, mais tout ce qui sort est un bafouillage incompréhensible. « Andrew ? mais.. qu’est-ce que tu fais là ? »
Adaline le fixe encore un instant, incapable de croire qu’il se tenait réellement devant elle après toutes ces années. Puis, comme un automatisme, elle s’écarte de la porte, l'invitant à entrer.
« Entre, » dit-elle avec un petit sourire amusé, essayant de cacher son trouble. « T’as pas perdu ton chemin au moins ? Santa Barbara, c’est pas exactement sur la route de tout le monde.»
En vérité, même si elle n’avait pas eu de nouvelles directes d’Andrew, elle n’était jamais complètement déconnectée de ce qu’il était devenu. Les médias s’étaient largement chargés de raconter son ascension vers la célébrité et Max s'était occupé de sa vie personnelle qui, a été assez tourmentée. D'ailleurs, son frère doit être impliqué sur la manière dont il aurait obtenu son adresse.
Andrew est sur un projet qui lui tient à cœur. Robin des Bois des temps modernes, un Robin des bois sombre prêt à tout pour se venger. Cela fait des années qu'il n'a pas vu Adaline. Et des années qu'il a des nouvelles seulement par l'intermédiaire de son frère, Max. Andrew a obtenu l'adresse d'Adaline lorsqu'il a dit à Max qu'il a un projet qui peut convenir à sa soeur. Il n'a pas hésité. Adaline peine apparemment à se faire connaitre, plus.
Andrew est connu. La plupart du temps il évite les médias. Il a peu de ressemblance avec eux. Envahissants et mettant leur nez partout, même dans les événements tristes de sa vie, Andrew les les fuit autant qu'il le peut. C'est ça d'être connu, ça a des avantages mais également beaucoup d'inconvénients. Andrew s'arrête devant chez elle. Il inspire profondément. Il le fait à chaque fois que quelque chose d'important se passe dans son existence. Un projet, une nouvelle journée avant qu'elles deviennent habituelles, bref, toutes ces choses importantes qu'il peut faire. Interviews, etc. Cela fait bien longtemps qu'il l'a vu la fois précédente. Un peu trop sans doute. Quinze ans, peut-être davantage. Oui, Andrew a eu toute une vie après qu'ils se soient éloignés. Andrew s'est garé dans l'allée et finalement après avoir expiré, il frappe à la porte.
Elle ouvre. C'est une femme désormais. Une femme de trente ans. Un peu plus sans doute. Il se souvient que leur amitié, leur complicité était autrefois sans appel. Aujourd'hui, ils se côtoient peu. Il ignore si elle demande de ses nouvelles, si elle sait que tous les événements de sa vie font ce qu'il est aujourd'hui. Les médias ont dû les lui annoncer.
« Je suis ravi de te voir Adaline. » dit-il alors avec un sourire. « Je suis ici temporairement, en réalité, j'ai un projet de série en cours et je viens te faire une proposition. » dit-il alors qu'il entre dans sa demeure. Une demeure sobre, simple mais charmante. Adaline a toujours été rêveuse et pourtant simple.
Secret Hollow semble avoir été tourné dans une autre vie. Une vingtaine d’année écoulée et les enfants de Hawes ont bien changé. Ce petit village niché au cœur des Yorkshire Dales en Angleterre. Un endroit paisible, presque figé dans le temps. C'est là qu'Adaline, Max et Andrew avaient grandi, entourés de vallées verdoyantes et de collines ondulantes. La nature y régnait en maître. Les moutons paissaient tranquillement sur les collines, tandis que de vieux murets de pierre séparaient les champs comme autant de cicatrices qui témoignaient du passage du temps. La tranquillité de cet endroit, presque irréelle. Il offrait une forme de refuge, un cocon pour les âmes sensibles comme Adaline. Hawes n’était pas seulement un cadre idyllique pour grandir, c’était un endroit où la tranquillité permettait de rêver. Une vision si différente face à la dureté du showbizz.
Adaline le regarde entrer dans sa maison, encore un peu déstabilisée par sa présence après tout ce temps. Elle referme doucement la porte derrière lui, ses pensées virevoltant en tous sens. Le voilà qui débarque avec un sourire, comme si tout était resté intact. Comme si la distance n’avait jamais existé. « Je ne te demande pas comment t’as eu mon adresse. » Un ricanement insinuant l’identité de l’intermédiaire. Adaline est loin d’être rancunière. Andrew s’est retrouvé dans la vague. Un ras de marée connu dans le milieu. Les propositions à foison après sa prestation dans la série. La notion du temps devient incontrôlable. Et il y est encore probablement vu son parcours actuel.
Andrew ne passe par quatre chemins en annonçant la raison de sa visite. Elle esquisse un sourire à son tour, essayant de masquer le tourbillon d’émotions qui la traverse. Andrew. Ici, dans son salon en train de parler de projets comme à l’époque où ils passaient des heures à imaginer des scénarios, à rêver de gloire et d'aventures. Sauf qu'aujourd'hui, c’est réel. Un projet de série, une proposition. Elle sent à la fois l’excitation et l’incertitude se mélanger en elle.
« Un projet ? » demande-t-elle avec un sourire amusé, croisant les bras, feignant la légèreté. « T’as pensé à moi pour ce projet après toutes ces années ? Tu côtoies pourtant du beau monde à présent dans le milieu. » Elle conserve un ton léger malgré une certaine vérité. Andrew a dépassé le cap des castings depuis un moment et il rencontre les acteurs les plus prometteurs.
Cela fait si longtemps qu'il a oublié quand est-ce que c'était précisément. Secret Hollow a été un projet qui l'a aidé à faire démarrer sa carrière et à se faire repérer et devenir un acteur dont la réputation n'est plus à faire. Andrew a vite été sous les projecteurs. Il a du talent. Toutes les productions - ou du moins une grande majorité - le réclame et le veut dans ses projets. C'est certainement sans recule vu le lien qu'il a avec la jeune femme - du moins qu'il a eu avec elle - cependant il trouve qu'elle mérite également de se retrouver sous les projecteurs et que ses talents d'actrice méritent d'être connus.
Il se retrouve face à elle. Il doit avouer que leur complicité d'autrefois lui revient à l'esprit. Il se rappelle également de l'endroit où il a grandit avec Max et Adaline. Un endroit paisible, simple, différent de ce qu'il connait aujourd'hui. Il a fait du chemin depuis, tout un monde s'est construit, structuré autour de lui.
Il pénètre dans sa demeure. Une demeure à l'image de sa propriétaire. Sans extravagance, simple, tout en étant chaleureuse. Acteur dans l'âme, autant qu'il est chanteur, Andrew réussi à camoufler sans la moindre difficultés ce qu'il ressent. Les événements de la vie aussi, l'ont aidé à camoufler ses émotions. Peut-être à tort, mais cela lui sert pour son métier.
« Tu connais déjà le coupable. » dit-il accompagné de ce sourire qu'il a toujours eu, de l'époque où il était inconnu jusqu'à ce jour. Andrew s'est éloigné, de part sa carrière qui a pris un tournant différent mais également parce qu'il savait à l'époque que s'il restait si près d'elle, cela serait différent, ce qu'il ressentait le mènerait à sa perte.
« C'est vrai mais qui mieux que toi pourrait me donner la réplique, des répliques cinglantes ? Attends juste de m'écouter avant de refuser. Je suis sûr que tu seras intéressée, cela titillera au moins ta curiosité. » dit-il avant de s'arrêter, essayant de sonder sa réaction. « Robin des bois, qu'est-ce que cela t'inspire ? » poursuit-il. « Et puis cela pourrait être comme à l'époque où on se chamaillait sans arrêt. » dit-il nostalgique. Oui, ils ont été proches, mais les chamailleries entre eux ont toujours été de mise.
Si Adaline n’avait plus de nouvelles directes d’Andrew, son frère Max, en a toujours. Leur lien, né bien avant le succès de Secret Hollow, n’a jamais été brisé. Malgré la carrière fulgurante d’Andrew, il a toujours trouvé le temps de garder contact avec Max. Ils partagent quelque chose d'unique, un mélange d’amitié profonde et d’un passé commun dans ce petit village de Hawes, loin des paillettes et de la frénésie de leur vie actuelle. Ce lien fraternel entre Max et Andrew qui a commencé bien avant que les caméras ne se braquent sur eux, semblait inébranlable. Pour Adaline, Secret Hollow avait rythmé leur vie pendant cinq ans. Cinq années intenses où le tournage et la promotion de la série occupaient une grande partie de leur quotidien. Pendant six mois de l’année, le cast vivait littéralement ensemble, se retrouvant quotidiennement sur les plateaux, lors des interviews et des événements publics. Ces moments partagés avaient tissé entre eux des liens puissants, des relations qui allaient bien au-delà de simples collègues de travail. Et parmi toutes ces connexions, celle qu'Adaline partageait avec Andrew était la plus marquante. Andrew n’était pas seulement un partenaire à l’écran. Il était son partenaire. Leur relation dans la série avait été centrale, un fil rouge qui captivait les fans, une dynamique à la fois complexe et intense. Cette proximité, ces scènes partagées où ils devaient incarner des émotions profondes souvent entre la tension et l’attirance avaient naturellement conduit à des moments où la frontière entre la fiction et la réalité devenait floue. Dans la série, leurs personnages vivaient des situations qui demandaient de la vulnérabilité et de l’intimité.
Adaline observe Andrew. Ses yeux cherchent à percer à travers ce sourire familier, celui qu'elle avait connu depuis l'époque où ils n’étaient que des adolescents à rêver de grandeur. Ce même sourire qui masqait toujours bien plus que ce qu’il laissait paraître. Quinze ans s'étaient écoulés depuis la fin de la série et sans surprise, Andrew conserve ce pétillement dans le regard malgré les épreuves vécues.
« Robin des Bois ? » répéte-t-elle en croisant les bras, un sourire en coin, essayant de garder une distance entre l’humour et les émotions qu'elle sent monter en elle. « Tu reviens après quinze ans pour me parler de notre légende nationale ? » Dit-elle avant d’ajouter en allant vers la cuisine. « J’ose espérer que ta concentration est plus solide qu'avant. Thé ou café ? » Adaline utilise toujours un ton léger, se souvenant des instants de complicités mais, aussi ceux durant lesquels ils n’étaient pas d’accord sur l’interprétation. Elle le dit à la légère mais une partie d’elle brûle de curiosité. Ce n’est pas rien qu’Andrew vienne jusqu’ici pour la voir. Il aurait pu choisir n’importe quelle actrice de renom, et pourtant, il est dans son salon, lui offrant une opportunité qu’elle a secrètement espérée depuis des années. Et au fond, même si elle ne le dit pas, elle était touchée.
Elle se tient face à lui, silencieuse un instant, laissant les souvenirs 'envahir. Leur complicité, leurs chamailleries incessantes, cette époque où tout semblait plus simple, où leurs rêves étaient encore à portée de main. Elle repense à Hawes, à ces moments passés dans les collines, loin du tumulte de la vie moderne, à une époque où ni la célébrité ni les épreuves n’avaient encore posé leur marque sur eux.
« Et on se chamaillait parce que tu me volais toujours mes répliques les plus percutantes et ensuite tu prétendais que c’était ton idée. » Elle se souvient encore de ces moments où, entre deux scènes, Andrew la regardait avec cette intensité qui dépassait le simple jeu d’acteur. Des regards, des gestes subtils qui, sur le plateau, pouvaient être interprétés comme de simples éléments de leur jeu mais qui pour elle, prenaient parfois un sens plus personnel. Elle se demandait souvent s'il ressentait la même chose, ou si elle était seule à vivre cette confusion émotionnelle. Cependant, Adaline savait que ces sentiments plus forts devaient être effacés, pour leur bien-être à tous les deux. Ils travaillaient ensemble, partageaient une dynamique qui faisait rêver des millions de fans, et la dernière chose qu’elle souhaitait, c’était de compliquer leur relation avec des émotions non résolues. Derrière chaque plaisanterie, derrière chaque boutade, il y avait toujours eu cette étrange alchimie, cette tension qu’elle avait tenté de réprimer pendant des années.
Elle n’a pas oublié le projet pour autant, au contraire. Il est temps de le relancer sur ce sujet. Adaline croise les bras en revenant dans le salon, prête à le bombarder de questions. Son sourire malicieux revenant doucement sur son visage. « Bon, et ton Robin des bois. Qui le produit ? Tu ferais Robin je suppose, et moi ? » Elle le fixe, déterminée à comprendre ce qu'il a vraiment en tête
Secret Hollow est une époque révolue. Si bien sûr, elle a existée, aujourd'hui, cela appartient au passé. Il sait qu'à cette époque il est sous le charme de sa partenaire. Malheureusement ou heureusement, cela dépend de la vision qu'on peut avoir de la situation, elle davantage qu'une partenaire. Elle est et demeurera toujours la soeur de son meilleur ami. Celle qui lui est interdite, formellement, quoi qu'il arrive. Il doit choisir entre son amitié avec Max, ou sa relation éventuelle, sans garantie aucune qu'elle dure, avec la jeune femme. Il a fait son choix il y a longtemps, ignorant s'il y avait une quelconque réciprocité dans ce qu'il avait pu ressentir. Il sait seulement qu'il a dû tout mettre de côté, comme ci cela était seulement de l'ordre de la fiction alors qu'il le sait, c'était plus que cela.
Andrew a continué son existence. Il s'est marié puis a dû faire face à des événements difficiles, compliqués, qui l'ont mis plus bas que terre. Andrew s'est relevé mais, il sait que des cicatrices demeurent dans sa vie, dans son esprit, l'empêchant d'être pleinement comblé et heureux. Il sait qu'il peut vivre seul, sans avoir quelqu'un. Il le fait depuis déjà longtemps. Il a essayé d'avoir une relation avec une femme, après celle qu'il a eu avec sa femme, mais cela s'est arrêté, rapidement, brutalement. Andrew était fragile, incertain, instable. Pourtant, sa carrière, elle, a toujours été certaine, sans l'ombre d'une incertitude. Il a foncé, sans s'arrêter.
Il se trouve aujourd'hui chez elle, comme ci ils étaient toujours restés en contact. Max lui a donné son adresse puis, l'acteur est venu sonner chez elle. Un matin, sans l'ombre d'un doute dans l'esprit. Jusqu'à ce qu'il se retrouve face à sa porte d'entrée. Pourtant inoffensive normalement, l'entrée de sa demeure l'a foudroyé de doutes. Si elle lui en veut, et elle aurait certainement raison de lui en vouloir, il ne saurait comment réagir.
Au lieu de cela, elle est là, face à lui, un peu abasourdie sans doute d'être face à lui, tant d'années après. « Robin des bois. » approuve-t-il. « Je savais que j'aurais dû attendre davantage. C'était prématuré. » dit-il alors, théâtralement. « Un thé, je suis de repos. Je garde le café lorsque je travaille, mais je te rassure ma concentration... s'est améliorée. » dit-il innocemment, haussant les épaules, faisant mine d'ignorer de quoi elle parle.
Andrew essaie autant qu'il le peut, de mettre tout cela de côté. Ce qu'il ressent. Il a toujours utilisé l'humour mais, aujourd'hui est plus que ça. Il l'utilise à chaque situation dérangeante et à tendance à éviter les sujets qui peuvent fâcher. Il le sait, s'il avait affronté Max à l'époque, sa vie aujourd'hui serait certainement différente.
« C'est faux ! » dit-il avant d'ajouter. « Bon, d'accord, à moitié faux. » dit-il levant les yeux au ciel, avant d'esquisser un sourire. Andrew a toujours été naturel avec elle et quand il a dû remettre un masque, celui qu'il met en avant à chaque fois qu'il apparait en public, cela l'a brisé. « C'est HBO qui produit ce projet. Je serais un Robin exemplaire, quoi que pas tout à fait. » dit-il alors. Il s'assied sur une des chaises, nettement plus hautes que les chaises classiques, qui sont des chaises de bar. « C'est une version sombre. Robin des bois vengeur. Il pense qu'à ça. » dit-il avant de poursuivre. « J'ai proposé ta candidature comme Marianne... » dit-il alors, incertain. C'est impressionnant comme cette jeune femme, qu'il connait depuis des années maintenant, provoque l'incertitude en lui.
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(Andrew) A pretty lil ghost
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